Le voyage est un moment à part, où l’on s’extrait du temps quotidien pour entrer dans une nouvelle temporalité. On a l’esprit plus disposé aux choses et progressivement, on se met à comprendre les endroits que l’on traversé.
Je ne m’étais jamais vraiment posé la question du moyen de transport. Après pas mal de lectures et notamment l’incontournable Usage du monde de Nicolas Bouvier, la question du moyen de transport est devenue de plus en plus évidente. En 52, il rejoint l’Inde avec une petite voiture pas du tout prête à une telle épreuve. La maîtrise mais aussi la dépendance au moyen de transport donne une saveur toute particulière à son voyage. Avec son compagnon Thierry Vernet, il voit ce qui se cache dans l’entre-deux. Parfois, il est contraint de rester dans un bled paumé en attendant une pièce détachée, il doit attendre que l’hiver passe alors qu’il se trouve à Tabriz… Il prend le temps. Le temps de voir puis le temps d’écrire et de coucher ses impressions sur le papier. Plus tard, Alain Guigny entreprendra un voyage de 44 000 kilomètres sur les routes du monde avec son vélo, puis viendra le tour de Tesson et Poussin et tant d’autres qui leur succéderont et qui partiront comme eux « rouler sur la terre ».
À vélo, on fait sien le voyage parce qu’on connaît chaque mètre parcouru. On voit le monde différemment, on médite, on apprend, on s’ouvre à d’autres cultures et on comprend ce qu’il se passe au-delà des frontières et au-delà des circuits touristiques habituels.
Tous les voyageurs que j’ai lus sont touchés par la lenteur du voyage et grisés par les descentes à tombeaux ouverts qui viennent récompenser l’effort de l’ascension, tous prennent le temps de se fondre dans les endroits qu’ils traversent et non pas simplement de les survoler. Le vélo est un moyen de transport facile à maîtriser, qui emmène loin mais fait apprécier chaque minute. C’est une transition de monde en monde.
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